L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) considère le changement climatique comme l’un des principaux défis sanitaires mondiaux du 21e siècle. Malgré leur faible contribution aux émissions de gaz à effet de serre, les pays africains ont déjà subi d’importantes pertes et dommages dans des secteurs clés de développement en raison de la perte de biodiversité, des pénuries d’eau, de la diminution de la production alimentaire, et du ralentissement de la croissance économique, autant de conséquences du changement climatique.
Selon le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), l’Afrique est confrontée à une exposition et à une vulnérabilité multidimensionnelle au changement climatique, résultant de l’intersection de facteurs socio-économiques, politiques et environnementaux sur le continent.
D’après une analyse conduite par l’OMS en 2022, 56 % des incidents de santé publique recensés sur le continent Africain au cours des 20 dernières années, étaient liés au climat.
L’urgence de prendre et mettre en œuvre des mesures d’adaptation
Dans son rapport, le GIEC prédit des températures élevées sans précédent pour la plupart des pays africains, ceci bien avant les pays généralement plus riches et situés à des latitudes plus élevées, et rappelle l’urgence de prendre des mesures d’adaptation en Afrique.
Bien que ces mesures soient rentables, les flux financiers annuels destinés à l’adaptation de l’Afrique sont largement inférieurs (de plusieurs milliards de dollars américains) aux estimations les plus basses du coût de l’adaptation au changement climatique à court terme.
C’est dans ce contexte d’urgence, et afin de proposer une réponse locale à ces enjeux globaux, que le programme accélérateur régional a été lancé par le consortium ENDA Tiers-Monde, ENDA Santé et ENDA énergie, avec le soutien de Foundation S – The Sanofi Collective.
Le programme Accélérateur Régional
Ce programme vise à accompagner le déploiement et le passage à l’échelle de solutions locales d’adaptation et de résilience aux impacts des changements climatiques sur la santé des communautés vulnérables, portées par 9 organisations dans 7 pays d’Afrique de l’Ouest et du Centre : Mali, Guinée-Bissau, Ghana, Sénégal, Burkina-Faso, Côte d’Ivoire, et Tchad.
Les organisations soutenues ont été sélectionnées lors d’un appel à candidature, lancé par Foundation S en mars 2023, dans le cadre de son programme Action Climatique & Résilience Sanitaire.
En Afrique, les populations dépendent directement des services écosystémiques. La protection et la restauration des écosystèmes, l’agriculture conservative, et la gestion durable des terres favorisent la résilience climatique. Ces stratégies d’adaptation, basées sur les écosystèmes, comme par exemple utiliser les mangroves comme protection côtière pour limiter l’érosion et la salinisation des terres, sont souvent plus rentables et réalisables que les investissements de masse dans l’infrastructure.
Renforcer la résilience des communautés périphériques du Parc de la Langue de Barbarie
C’est ce que propose le GIE des Ecogardes du Parc de la Langue de Barbarie dans la région de Saint Louis, dans le nord du Sénégal. La péninsule de 30km de long subit depuis 15 ans les assauts de l’Atlantique, qui s’engouffre à l’embouchure du fleuve Sénégal. Cette flèche sablonneuse très fine (entre 100m et 300m de large), située juste en face de l’île de Saint Louis, est considérée comme l’un des quartiers à la plus forte densité de population au monde.
Le parc national de la Langue de Barbarie, créé en 1976, est situé dans le Gandiolais, à une vingtaine de kilomètres au sud de Saint-Louis, près de l’embouchure du fleuve Sénégal. Le recul du trait de côte accélère la salinisation des terres pour le maraichage, et provoque une diminution de la productivité halieutique et maraichère, impactant directement la santé des populations locales.
Le projet de renforcement de la résilience des communautés périphériques du Parc de la Langue de Barbarie vise à reboiser la mangrove, afin d’une part de renforcer la production de fruits de mer, et d’autre part de limiter l’érosion côtière et la salinisation des superficies maraichères pour les 17 villages périphériques. Par ailleurs, la récolte et la commercialisation étant principalement la responsabilité des femmes de la région, le projet permettra de relancer leur activité économique tout en améliorant l’alimentation des populations. Enfin, les mangroves constituent une nurserie pour les poissons, leur reboisement aura donc sur le long terme, un impact positif sur la pêche.
Ces actions permettront aux communautés des 17 villages de s’adapter aux effets du changement climatiques en luttant contre la salinisation des terres, la montée des eaux et la raréfaction des ressources halieutiques. SI la partie Sud de la Langue est en train de disparaître, le conservateur du parc garde espoir pour préserver et reconstruire la partie Nord, par des solutions accessibles et efficaces que sont le reboisement de la mangrove, la protection des aires marines et la création des digues sous-marines. Elles constituent l’ultime stratégie afin de ne pas devoir reloger les habitants de la Langue. Par ailleurs, la disparition de la Langue de Barbarie rendrait la ville de Saint Louis et ses 300 000 habitants, dont la moitié se trouve en situation de précarité, particulièrement vulnérable aux effets du changement climatiques et à la montée des eaux.